30 novembre 2020

L'anomalie

L'anomalie d'Hervé le Tellier est sans aucun doute bien loin de mes lectures habituelles. C'est un peu un OVNI alors qu'en matière de littérature je suis très terrienne. J'aime les histoires ancrées dans le réel, les personnages qui me ressemblent un peu, qui aiment, vivent, souffrent, se dévoilent. 
 
De Le Tellier, je n'avais lu qu'un livre il y a quelques années "Assez parlé d'amour" que j'avais trouvé plutôt réussi. Mais surtout, j'aimais sa voix, sa fulgurance spirituelle, ses jeux de mots de vrai Oulipien écoutés pendant des années sur France Culture dans les papous dans la tête. 
 
De l'anomalie, j'ai dévoré les 100 premières pages, fascinée par des personnages aussi troublants que charismatiques (sans doute mon coté terrienne) . Le Tellier dépeint une galerie d'humains dont on devine un lien mystérieux (façon roman chorale). Quel peut bien être le point commun entre un tueur à gage, une avocate, un couple en perdition, un traducteur, une gamine et sa grenouille, un chercheur en mathématiques ? Visiblement un Paris New York en 2021. Ils sont tous profondément attachants et chaque chapitre donne envie de poursuivre pour une nouvelle rencontre…
Puis survient l’Évènement, celui qui va faire chavirer d'un roman classique à un roman de science fiction entre philosophie, politique et statistiques. Nous voila baladés entre surréalisme et rationalité. Rien ne semble approximatif, Monsieur Le Tellier est diplômé de mathématiques et cela se sent. On n'est pas ici dans l'approximation. L'évènement serait donc possible ...(je m'arrête là pour ne rien divulgâcher!) 
 
A tous ceux qui me demandaient "alors, tu as aimé ?" Je répondais difficile de parler de ce roman sans en abimer le mystère. Le fameux Événement ne peut se raconter. Il faut le lire. Difficile aussi de dire que j'ai adoré. En revanche, ce qui est certain, c'est que le livre m'a interpellée et réellement marquée par les questions qu'il suscite sur notre rapport à la vie, à notre identité, notre unicité.  Quid de nos amours, nos maladies, nos infimes existences s'il fallait les revivre? 
Merci Monsieur Le Tellier de m'avoir un peu sortie de ma zone de confort littéraire (et dieu sait que pourtant je déteste les turbulences !)

5 novembre 2020

Né d'aucune femme

Un immense merci à AC pour ce prêt ! 

Un de ces romans inoubliables par sa puissance littéraire et romanesque ; un modèle du genre en matière d’écriture, ou comme dépeindre l’innommable avec intensité et poésie parfois. Et pourtant le livre le plus violent lu à ce jour.

Rose a 14 ans, elle est vendue par son père Onésime pour quelques pièces d’or … C’est le début du calvaire pour elle, calvaire raconté dans ses cahiers, « les cahiers de Rose », comme un rappel de l’importance de l’écriture, celle qui transmet, celle qui perpétue, celle qui permet de ne pas oublier.

Il n’y pas que peu de détails de date et de lieu pour nous faire percevoir sa transposabilité à chaque coin du globe et à toutes les époques.

Elle est racontée par les différents protagonistes, Rose, d’abord, sublime héroïne, prisonnière de l’incarnation du mal et de l’ignominie.  Viennent ensuite le regard d’Edmond, impuissant spectateur des souffrances de Rose, Onésime et sa culpabilité, la mère, etc.   

A chaque page, j’avais la gorge serrée, oscillant entre envie de tout poser (tant la lecture est douloureuse parfois) et frénésie de lecture dès que l’auteur laissait entr’apercevoir une lueur d’espoir.  Chaque souffrance infligée à Rose était un coup de poing dans mon estomac, chaque regard d’Edmond une caresse laissant croire en la bonté humaine.

A lire. ÉVIDEMMENT

Pilules Roses, De l’ignorance en médecine » (Stock, 2023) de Juliette Ferry-Danini

Le SPASFON (phloroglucinol), vous connaissez bien sûr ! Qui n’a pas reçu, au cours de sa vie ce comprimé rose fuchsia, dragéifié façon bonbo...